acteurs prévention

 RESPONSABILITE EN MATIERE D’ACCIDENT DU TRAVAIL ET DE MALADIE PROFESSIONNELLE

 

Chaque salarié de l’entreprise peut revendiquer le droit à la sécurité. Cependant, ce dernier ne peut être respecté que par la prévention des risques professionnels qui elle, est le devoir de tous.

Si l’employeur est le premier concerné, chaque acteur a son propre rôle à jouer.

Le juge veille à ce que chacun accomplisse ce devoir et, au besoin, oblige le fautif à réparer les dommages causés par son fait (responsabilité civile) et/ou le sanctionne (responsabilité pénale).

Tant sur le plan civil que pénal, la sécurité est une obligation de résultat : elle n’est donc pas négociable.

 

  • RÔLE DES ACTEURS

La direction : le chef d’entreprise ou son délégataire

Le Chef d’entreprise doit :

• Informer solennellement l’ensemble des salariés de ses orientations en matière de protection

• de la Sécurité et de la santé ( politique sécurité)

• Définir la manière dont il entend que la Sécurité soit intégrée dans tous les domaines d’activités ayant une incidence sur le niveau de Sécurité

• Répartir de manière claire et précise le rôle et les responsabilités de chacun dans ce domaine (définitions de fonctions, délégations de pouvoir)

• Fournir les moyens nécessaires à l’exercice par l’encadrement de ses missions

• Contrôler l’efficacité des mesures adoptées par des visites et audits

• Veiller au respect des règles édictées par le code du travail et celles prises en interne pour son application, en faisant usage, le cas échéant, des sanctions prévues au règlement intérieur

• Faire de la sécurité une obligation de résultat au même titre que la production ou la qualité

• Organiser la sécurité sur les plans techniques, humains et des méthodes de travail

• Engager les budgets visant à supprimer les risques et à améliorer les conditions de travail

• Dialoguer avec les instances de prévention (CHSCT, service sécurité) et les pouvoirs publics

 

Le délégataire :

La délégation de pouvoir par laquelle le chef d’entreprise confie une partie de ses pouvoirs à un ou plusieurs acteurs est une réponse à l ’obligation qui pèse sur celui-ci de mise en place d ’une organisation adaptée figurant à l ’article L. 4121-1 du Code du Travail.

La répartition des pouvoirs et des responsabilités s’inscrit dans le cadre d ’une organisation générale à la sécurité dont la mise en oeuvre incombe à la Direction (Accord national interprofessionnel du 23 avril 1983)

Compte tenu de sa compétence, des moyens dont il dispose et de l’autorité qui lui est conférée, il appartient au titulaire d’une délégation de pouvoir d’assumer les attributions qui lui sont déléguées. Son rôle résulte donc directement du contenu de sa délégation.

L’encadrement

" Il entre dans la vocation du personnel d’encadrement d’appliquer ou de faire appliquer la réglementation d’hygiène et de sécurité et de veiller à l’amélioration de la prévention des accidents au regard du personnel placé sous son autorité ".( accord national interprofessionnel du 10 avril 1983).

 

Cadres et agents de maîtrise :

• S’assurent par tous moyens de la sécurité et de la conformité des unités dont ils ont la charge

• Intègrent dans l’organisation du travail les règlements, prescriptions et recommandations internes et externes portées à leur connaissance

• Veillent à la mise en place des consignes et des modes opératoires

• facilitent la recherche, le signalement et le traitement des risques et/ou dysfonctionnements

(Décret du 5/11/2001)

• Organisent et engagent les actions de formation et de sensibilisation du personnel en matière de prévention

• inscrivent le niveau de sécurité comme un indicateur de performance aussi important que le niveau de qualité

• Traitent immédiatement toute dérive ou menace de dérive dangereuse pour la sécurité au travail

• sollicitent la prise de sanctions en cas d’écart aux consignes en vigueur

 

Le responsable de la sécurité

L’agent chargé de la sécurité et des conditions de travail assiste et conseille l’employeur pour :

• La définition d’une politique de prévention

• L’évaluation des risques de l’entreprise

• L’établissement d’un programme de prévention et d’une organisation des premiers secours et de lutte contre l’incendie

• L’analyse des processus de fabrication, des aménagements de postes et le choix des EPI

• Le suivi des mesures de prévention (vérifications et contrôles)

• L’évaluation et l’exploitation des résultats de son entourage (L.4122-1 CT)

• Signaler immédiatement à l’encadrement toute situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent

• Participer, chaque fois que possible, à l’évaluation des risques de son poste de travail

 

Les institutions représentatives du personnel

L’institution qui a un le plus grand rôle à jouer est évidemment le Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT), ou à défaut, les Délégués du Personnel qui exercent les missions du CHSCT :

• dans les établissements de moins de 50 salariés

• ou dans les établissements de plus de 50 salariés n’ayant pas CHSCT

Articles L 4612-1 du code du travail

" le CHSCT a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des salariés de l ’entreprise... "

" il procède à l ’analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les salariés ainsi qu ’à l’analyse des conditions de travail.... "

" il reçoit les informations qui lui sont nécessaires pour l ’exercice de ses missions "

" il donne son avis sur les documents se rattachant à sa mission..."

Il doit aussi :

• Enquêter sur les accidents du travail et les maladies professionnelles

• Enquêter lorsque le droit d ’alerte et de retrait d ’une situation dangereuse est actionné par un salarié

• Inspecter périodiquement les lieux de travail

• Être consulté avant toute décision d’aménagement des postes de travail

• Concourir à la formation à la Sécurité

• Susciter toute initiative portant sur l’amélioration de l ’HSCT

 

Le salarié

Chaque salarié doit :

• Respecter strictement les instructions

• Éviter, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, tout acte ou omission au travail

Susceptible de porter atteinte à (...) la sécurité de son entourage (L.4122-1 CT)

• Signaler immédiatement à l’encadrement toute situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent

• Participer, chaque fois que possible, à l ’évaluation des risques de son poste de travail

 

Les entreprises extérieures

Les différents fournisseurs de l’entreprise, fabricants, sous-traitants, prestataires de services doivent respecter les termes du contrat qui les lient à l’entreprise ainsi bien sûr que la réglementation.

" Il est interdit d’exposer, de mettre en vente, de vendre, d’importer, de louer, de mettre à disposition, de céder à quelque titre que ce soit, de mettre en service ou d’utiliser des équipements de travail et des moyens de protection qui ne répondent pas aux règles techniques et procédures de certification qui leur sont applicables.

Les machines, appareils, outils, engins, matériels et installations désignés par les termes d’équipements de travail doivent être conçus et construits de façon que leur mise en place, leur utilisation, leur réglage, leur maintenance, dans des conditions conformes à leur destination, y compris en cas de modification, n’exposent pas les personnes à un risque d’atteinte à leur sécurité ou leur santé.

Les protecteurs et dispositifs de protection, les équipements et produits de protection individuelle dénommés moyens de protection doivent être conçus et fabriqués de manière à protéger les personnes, dans des conditions d’utilisation et de maintenance, y compris en cas de modification, conformes à leur destination, contre les risques pour lesquels ils sont prévus ".

Article L. 4311-2 du code du travail

Le fabricant, ou l’importateur, ou le responsable de la mise sur le marché d’un exemplaire neuf ou considéré comme neuf d’équipement de travail de composant de sécurité ou d’équipement de protection individuelle, doit établir et signer et remettre une déclaration CE de conformité par laquelle il atteste que l’équipement de travail ou moyen de protection concerné est conforme aux règles techniques et satisfait aux règles de procédure qui lui sont applicables.

Des obligations de même nature sont prévues pour les équipements de travail ou les moyens de protection d’occasion (C. trav., art. R. 4313-66).

Par ailleurs toute entreprise, juridiquement indépendante de l’entreprise utilisatrice, amenée à faire travailler son personnel, ponctuellement ou en permanence, dans les locaux d’une autre entreprise utilisatrice, qu’il y ait ou non une relation contractuelle entre l’entreprise utilisatrice et cette entreprise se doit de respecter la réglementation visant à la prévention des risques dus à l’interférence des activités. (décret du 20/02/92, décret du 26/12/94 (BTP), arrêté du 26/04/96 chargement déchargement).

 

Le médecin du travail

Le médecin du travail a un rôle exclusivement préventif qui " consiste à éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d’hygiène du travail, les risques de contagion et l’état de santé des travailleurs ". Il s’appuie pour cela sur les examens médicaux des salariés mais aussi sur les actions en milieu de travail durant le " tiers temps ".

Mission du médecin du travail :

• Conseille le chef d’entreprise, les salariés et leurs représentants

• Intervient sur l’amélioration des conditions de vie et de travail dans l’entreprise, l’adaptation des postes de travail, des rythmes de travail, la protection des salariés contre l’ensemble des nuisances physiques ou chimiques.

• Veille à l’hygiène générale de l’établissement ou des services de restauration, et participe à la prévention et l’éducation sanitaire des salariés.

Activité du médecin du travail (répartie entre les visites médicales et l’action sur le milieu de travail ou " tiers temps " ) :

• Surveillance de la santé des salariés et détermination de l’aptitude (ou de l’inaptitude) au poste de travail au cours de la visite d’embauche, des visites périodiques (au moins biennales) et des visites de reprise du travail après un arrêt pour maladie, accident du travail ou maladie professionnelle, congé maternité.

• Etude des conditions de travail, des risques et des nuisances et proposition d’améliorations, dans différents domaines : sécurité, prévention des accidents du travail, des risques toxiques, étude des ambiances (thermique, sonore, lumineuse) de travail, de la charge physique ou mentale du travail. Il a libre accès aux lieux de travail ,il participe à l’évaluation des risques en établissant une fiche d’entreprise.

• Association aux études des nouvelles techniques de production, ainsi qu’à la formation à la sécurité et des secouristes. Le médecin du travail est de fait informé de la nature et de la composition des produits utilisés et leurs modalités d’emploi.

• Le médecin du travail ne dispense pas de soins à l’exception des situations d’urgence

• Il peut participer la veille sanitaire en collaborant à des enquêtes épidémiologiques

 

Responsabilité civile

L’employeur est tenu envers son salarié à une obligation de sécurité de résultat.

Le manquement à cette obligation a le caractère de faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié.

La reconnaissance de la faute inexcusable permet au salarié victime d’un accident du travail ou d’un maladie professionnelle (AT/MP) d’obtenir la réparation intégrale des préjudices qui ne sont pas indemnisés par le système de réparation forfaitaire résultant de l’assurance des AT/MP.

" L’auteur de la faute inexcusable est responsable sur son patrimoine personnel des conséquences de celle-ci. " (article L 452-4, alinéa 2 du code de la sécurité sociale).

Lorsque l’employeur est une personne physique, les effets de l’article L 452-4, alinéa 2 du code de la sécurité sociale sont pleinement applicables à son patrimoine personnel ! (cas de l’entreprise individuelle).

Une négligence grave peut également être sanctionnée par la perte d ’emploi !

Selon l’article L 230-3 du Code du travail, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail. Dès lors, même s’il n’a pas reçu de délégation de pouvoir, un salarié répond des fautes qu’il a commises dans l’exécution de son contrat de travail. (Cass. soc. 28 février 2002, n° 881 FS-PBRI, Deschler c/ SA Textar France.)

 

Responsabilité pénale

Pour les infractions aux règles du droit du travail c’est en principe l’employeur qui est responsable pénalement des infractions commises.

Il peut cependant déléguer une partie de ses pouvoirs : dans ce cas l’objet de la délégation est de replacer la responsabilité pénale sur celui qui détient réellement le pouvoir décisionnel et qui est concrètement en mesure de veiller au respect de la réglementation.

Seules sont concernées les infractions visées par la délégation : responsabilité alternative.

Pour les infractions au code pénal la responsabilité est cumulative : toute personne dont le comportement au travail aura été à l’origine d’un accident du travail ou d’une atteinte à la santé des travailleurs pourra voir sa responsabilité pénale recherchée et faire l’objet d’une condamnation par les tribunaux répressifs, peu important son statut, sa fonction ou même le lien qui l’unit à l’entreprise.

 

Le Chef d’entreprise ou son délégataire

En cas de carence dans la direction du personnel ou la surveillance de l’application de la réglementation, sa responsabilité pénale pourra être recherchée en cas d’accident.

Exemple : Pour avoir, " par son comportement créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage, omis de prendre les mesures permettant de l’éviter " - accident mortel - délit d’homicide involontaire par imprudence - condamnation du gérant de fait de l’entreprise à 2 ans d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis, 7.500 euros d’amende, 5 ans d’interdiction d’exercice de l’activité professionnelle de Directeur d’établissement (Cour d’appel d’Orléans, 21 septembre 2004).

 

L’encadrement

" Il entre dans la vocation du personnel d ’encadrement d ’appliquer et de faire appliquer la réglementation d ’hygiène et de sécurité au regard du personnel placé sous son autorité ".

(accord national interprofessionnel du 10 avril 1983)

" Délégataires ou pas du chef d ’entreprise, (les membres de l’encadrement) assument, quel que soit leur rang, une responsabilité de sécurité pour le secteur qui leur est confié en cas d ’accident du travail "

(art 21 de l ’accord cadre du 17 mars 1975)

Ainsi, l’agent de maîtrise ou le cadre qui ne veille pas en permanence à faire respecter les consignes en vigueur, l ’ordre et le rangement, le port des protections individuelles, la protection des machines, le suivi des modes opératoires par exemple, peut être poursuivi devant les tribunaux répressifs en cas d ’accident.

La fonction sécurité

L’agent chargé de la sécurité et des conditions de travail ne peut jamais être titulaire d’une délégation de pouvoir (jurisprudence constante) mais, conformément aux principes du droit pénal français, et notamment à celui de la personnalité de la peine, il peut être jugé responsable des fautes professionnelles qu’il a personnellement commises, notamment lorsqu ’il s ’abstient d ’alerter les opérateurs et l ’encadrement sur les dangers graves présentés par un produit ou de prendre les consignes appropriées.

 

Les salariés

Sous réserve que les équipements de travail sur lesquels ils travaillent soient conformes, que les équipements de protection individuelle adaptés leur soient fournis et qu ’ils aient assimilé les consignes et modes opératoires de sécurité transmis dans le cadre des actions de formation à la sécurité, les opérateurs à l ’origine d ’un accident du travail par inobservation des règles de prévention sont eux aussi pénalement responsables.

Exemple : neutralisation par deux ouvriers d’un système de sécurité ayant " directement créé la situation qui a permis la réalisation du dommage " accident mortel -faute caractérisée - 6 mois d’emprisonnement avec sursis (Tribunal correctionnel Blois, 6 juin 2003)

 

Les entreprises extérieures

Engagent leur responsabilité pénale :

• la société de prestation de services qui ne respecte pas les mesures de sécurité arrêtées avec l ’entreprise d ’accueil figurant au plan de prévention

Exemple : Accidents mortel - faute caractérisée - condamnation à 30 mois d’emprisonnement assortis du sursis + amende de 12.000 euros et l’interdiction d’exercer l’activité professionnelle concernée pendant 5 ans (Tribunal correctionnel de Gap, 26 février 2004)

• l ’ingénieur, salarié d’un organisme de contrôle agréé qui valide la conformité des installations ou matériels qui se révèlent en définitive défectueux.

• le vendeur ou le fabricant qui induit en erreur l ’utilisateur sur la conformité d ’un équipement qui se révèle dangereux pour la santé ou la sécurité.

• le coordonnateur SPS de sécurité qui ne veille pas à la mise en oeuvre des principes de prévention sur les chantiers.

 

La personne morale

La responsabilité pénale des personnes morales n’est engagée que dans les cas prévus par la loi ou le règlement (elle est prévue pour les atteintes à l’intégrité physique).

Attention : la responsabilité pénale des personnes morales est étendue à toutes les infractions à compter du 31 décembre 2005

La personne morale peut être poursuivie devant les tribunaux répressifs pour les fautes de sécurité commises par ses organes (PDG) ou ses représentants (chef d ’établissement ou délégataires), en particulier quand les dysfonctionnement à l ’origine de l ’accident sont nombreux et démontrent un défaut de surveillance ou d ’organisation du travail

Exemple : accident mortel – faute d’une " particulière gravité " : condamnation de la personne morale à une amende de 200.000 euros dont 130.000 assortis du sursis + diffusion à ses frais d’extraits du jugement dans les quotidiens Le Figaro et Le Monde (Tribunal correctionnel de Gap, 26 février 2004).

 

La condamnation à une sanction pénale de la personne morale en cas d ’accident n ’exclue en rien la condamnation des personnes physiques.